Géorgie Sauvage : Une aventure de ski inoubliable
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Géorgie Sauvage : Une aventure de ski inoubliable

Mon copain et moi habitons à Revelstoke, en Colombie-Britannique, un petit paradis pour les sports d’hiver. Pour la fin de la saison 2023, on avait envie d’une aventure qui mêle culture et ski, et d’une destination moins explorée. La Géorgie cochait toutes les cases – et non, pas la Géorgie des États-Unis ! Je parle de cette petite nation située à la jonction de l’Europe de l’Est et de l’Asie de l’Ouest, bordée au nord par la Russie. Notre objectif était clair: explorer le pays à skis, découvrir la culture locale et, si la météo le permettait, atteindre quelques sommets du Caucase. Un récit de Marie-Christine Lauzon.

Premiers pas à Tbilissi

À notre arrivée à Tbilissi le 4 avril 2023, nous louons une voiture pour simplifier nos déplacements avec tout notre équipement: les coûts s’élèvent à environ 1000 $ pour 20 jours. On nous remet une Mitsubishi Outlander avec des pneus d’hiver usés à la corde. Le vendeur nous assure que « tout ira bien » pour les routes hivernales. On devra faire avec ça…

Avant de partir vers les montagnes, nous faisons le plein de provisions, dont une tâche critique: trouver de l’isobutane pour notre brûleur. Au Dry Bridge Flea Market, un Géorgien m’aborde et m’aide spontanément. Très vite, le voisinage entier se mobilise pour nous aider à trouver un magasin qui pourrait vendre des bouteilles de gaz. Mon nouvel ami m’invite à partir en mission avec lui dans les rues bondées de Tbilissi. Je saute sur l’occasion, monte dans sa voiture, c’est le chaos organisé où le klaxon sert de clignotant! Après une demi-heure de recherche, nous tombons enfin sur une petite boutique de sports qui vend le précieux isobutane. Cette générosité spontanée nous donne un avant-goût de l’hospitalité géorgienne.

À gauche: Vue sur la vieille ville de Tbilisi depuis la forteresse de Narikala. À droite: Des skis bien à la vue dans les ruelles de Tbilissi, de quoi faire tourner les têtes. Crédit: Marie-Christine Lauzon

En route vers Mestia

Les routes géorgiennes sont une aventure en soi. En direction de Mestia, le trajet prévu de deux jours prend une tournure inattendue: un glissement de terrain a détruit la route principale, nous forçant à un long détour. Nous arrivons tard le soir à Jvari, une petite ville située au pied du Grand Caucase. C'est à Jvari qu’est situé le barrage Inguri, le deuxième plus haut barrage-voûte hydroélectrique au monde construit pendant l’ère soviétique. Hydro-Québec a été consultant lors de son interminable réhabilitation dans les années 2000.

Fatigués, on trouve une auberge bon marché et sommes accueillis par un couple âgé. La demeure a une architecture qui nous ramène à l’époque de l’ère soviétique. Le couple qui nous accueille chaleureusement a vécu la majorité de leur vie à cette époque et parle seulement géorgien et russe. En moins de deux minutes, on a en main un verre de vin maison, de la confiture et du pain artisanal, et un shooter de chacha, l’alcool national qui peut être fréquemment distillé jusqu’à 75%. On baragouine en géorgien pour essayer d’entamer une discussion mais on finit par utiliser « Gaumarjos! » à profusion, le mot géorgien pour « Santé! ». La soirée prend vite des allures festives, où nos hôtes nous font trinquer dans une corne de vache traditionnelle, symbole d’hospitalité, qu’il faut vider d’un trait. Le lendemain, on reprend la route, plus fatigués que la veille et un peu lendemain de brosse.

À gauche: « Gaumarjos ! » Nos hôtes nous font trinquer dans une corne traditionnelle, symbole d’hospitalité, qu’il faut vider d’un trait. À droite: Les « délicieux » vins maisons géorgiens. Crédit: Marie-Christine Lauzon

La brume enveloppe les montagnes jusqu’à notre arrivée à Mestia, à 1500 m d’altitude. Ce village est profondément ancré dans une vallée escarpée, près de la frontière russe. C’est un monde à part : des voitures Mitsubishi Delica importées du Japon alignées dans les rues, des chiens errants, des vaches et des cochons qui se promènent librement. La cuisine locale est un régal : des khachapuri (pains au fromage) et des khinkali (raviolis juteux), des ragoûts de viande goûteux, le tout accompagné de vins locaux délicieux et abordables.

Le printemps à Mestia, dans le Grand Caucase. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Premiers virages à Tetnuldi

Pour notre première journée de ski, on décide de s’acclimater à la station de ski de Tetnuldi, hôte du Freeride World Tour 2024 — une première pour la Géorgie. La station culmine à 3160 m, avec un dénivelé de 895 m et cinq télésièges. Une heure de trajet sur route non pavée et enneigée nous attend. On comprend vite pourquoi les Delica sont si prisées ici : il n’y a pas de déneigement, et 30 cm de neige mouillée recouvrent la route. À certains endroits, il nous faut plusieurs tentatives pour franchir les multiples nids-de-poule dans les côtes escarpées, tandis que d’autres véhicules restent bloqués; c’est sportif! Décidément, grandir dans les hivers québécois nous aura porté fruit.

Crédit: Marie-Christine Lauzon

Arrivés sur place, on apprend que c’est le dernier jour de la saison. Le soleil brille et 30 cm de neige fraîche recouvrent le domaine dénudé d’arbres: jackpot! Quelques minutes de marche suffisent pour atteindre des versants inaccessibles par les remontées. Les conditions sont sublimes et chaque virage dans la poudreuse nous rappelle pourquoi on aime le ski. Durant une des ascensions, je croise un vieil ami suisse rencontré au Freeride World Tour d’Hakuba, au Japon, quatre ans auparavant, quelle coïncidence! Dans la remontée mécanique, je fais aussi la rencontre d’un couple russe réfugié en Géorgie pour échapper à la conscription militaire. Ils expliquent que nombreux sont les jeunes Russes qui partent par peur d’être envoyés au front en Ukraine. Une réalité poignante qui contraste avec le paysage enneigé et paisible qui nous entoure.

À gauche: Conditions parfaites pour la dernière journée à la station de Tetnuldi. Pour certains, le nombre de virage est très important… À droite: Premier arrivé, dernier parti. Coincée derrière une armada de Delica. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Explorations autour de Mestia

Les jours suivants, on explore les environs en ski de randonnée. En analysant des cartes topographiques sur l’application Gaia et en repérant les accès en voiture, on découvre des itinéraires prometteurs. Chaque journée débute par un café au ERTI KAVA, suivi d’une approche en bottes de randonnée, skis et chaussures sur le dos, pour atteindre la neige vers 2000 m d’altitude. La météo n’est pas favorable, on se fait souvent whiteout (journée blanche) et on ski sur une croûte cartonnée (breakable crust). Ce ne sont pas les conditions rêvées mais les délicieux repas du soir nous consolent.

À gauche: L’approche se fait à pied pour atteindre la neige. À droite: ERTIKAVA, notre café préféré à Mestia. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Une fenêtre météo se profile enfin, l’occasion attendue de monter un camp de base en haute montagne. On fait le plein de provisions pour sept jours et on prend la direction d’Ushguli. Sur Google Maps, le trajet est estimé à une heure; en réalité, il nous en faudra près de trois. Le trajet non pavé serpente dans un canyon étroit, bordé de falaises de schiste friables et sujet à des chutes de pierres fréquentes.

La route sinueuse vers Ushguli. Crédit: Marie-Christine Lauzon
En Georgie comme au Québec, la construction routière peut créer des délais. Ce «bulldozer» vintage est encore utilisé à ce jour. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Ushguli : un voyage dans le temps

Classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, Ushguli est le plus haut village habité en permanence en Europe, à 2100 m d’altitude. Il repose au pied de l’impressionnante muraille de Bezingi, une chaîne de sommets culminant à 5000 m, dont le Shkhara, la plus haute montagne de Géorgie à 5193 m. Les trois petits villages qui forment Ushguli comptent la plus forte concentration de tours svanes millénaires du pays. Ici, le temps semble s’être arrêté. Pas d’hôtels modernes, une épicerie mobile qui passe à l’entrée de la ville une à deux fois par semaine pour porter des provisions aux habitants, et plus de vaches que de voitures sur les routes non pavées et escarpées. Les maisons de pierre aux toits de schiste semblent immuables. Nous séjournons dans une maison d’hôtes familiale, Guesthouse Nora, entourée d’animaux de ferme, dans un cadre exceptionnel où l'on peut littéralement partir skier directement depuis la porte.

À gauche: Embouteillage typique à Ushguli. À droite: Les maisons en pierre et aux toits de schistes reste immuables. Crédit: Marie-Christine Lauzon
Descente sur Chubedishi Shoulder. Crédit: Marie-Christine Lauzon

En attente de la fenêtre météo, on explore le secteur avec une sortie vers la montagne de Chubedishi qui offre une vue splendide sur le village et ses tours anciennes. Une tentative vers le col de Gorvashi est avortée par la pluie battante, qui, on l’espère, tombe en neige en altitude. Chaque épisode de précipitations provoque des coupures d’électricité. Malgré cela, les cafés du village restent ouverts et nous dînons à la lueur du feu. L’hospitalité géorgienne est extraordinaire et les habitants apprécient nos efforts pour parler leur langue.

Lunch au Café bar Enguri : au menu, ragoût de viande, vin et pain artisanal. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Camp de base au pied du Shkhara

La météo s’améliore après la tempête. On part avec six jours de provisions pour établir notre camp de base à 2900 m, au pied du Shkhara. L’ascension est éreintante; la neige lourde et humide nous engloutit jusqu’aux genoux. Heureusement, nos skis Renoun, larges et légers, nous permettent d’avancer malgré les conditions difficiles. À la fin de la journée, on atteint enfin le site sélectionné et on établit notre camp. La première mission : trouver de l’eau potable. Après plusieurs tentatives, nous découvrons un ruisseau sous trois mètres de neige : une victoire qui nous épargnera le travail fastidieux de faire fondre de la neige.

Camp de base : 2900 m, au pied du Shkhara, caché dans les nuages. Crédit: Marie-Christine Lauzon

Les cinq jours d’exploration à ski sont incroyables. Les glaciers sont raides et crevassés, le terrain, exigeant. Les températures élevées empêchent le regel nocturne, rendant le manteau neigeux isothermique, instable et imprévisible.

Malgré les départs à l’aube, le risque d’avalanche persiste. Il fait jusqu’à 15 degrés en après-midi et le soleil plombe sur la neige. Au fil des jours, presque toutes les pentes sud subissent des avalanches. Nous trouvons de la bonne neige au-dessus de 3200 m sur les versants nord. Cependant, nous évitons les pentes raides et le ski sous les corniches, maifs nous apprécions la neige de printemps. Skier dans ce décor spectaculaire est une expérience magique mais l’isolement et les conditions nous rappellent constamment de rester conservateurs. L’été nous rattrape et nous force à abandonner la majorité de nos objectifs de ski. Cela nous permet d’explorer le reste de la Géorgie.

Dans le Grand Caucase, on se sent au somment du monde. Crédit: Marie-Christine Lauzon
Couché de soleil sur le Shkhara. Crédit: Marie-Christine Lauzon
Vue sur Skhara Ouest.Descente sur le versant nord du Karetta. Crédit: Marie-Christine Lauzon

La vie après le Grand Caucase

Pour conclure le voyage, nous explorons Kvemo Alvani et son école d’art svane, puis nous nous dirigeons vers Stepantsminda pour admirer la Gergeti Trinity Church. À Juta, nous chaussons les skis pour nous aventurer dans le Chaukhi Pass. Enfin, une randonnée en montagne à Lagodekhi marque la dernière étape avant de retourner à Tbilisi.

La Géorgie m’a profondément marqué : une mosaïque d’aventure, de culture, de chaleur humaine et de gastronomie. Si c’était à refaire, je choisirais de partir un mois plus tôt afin de profiter de meilleures conditions de neige.

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