Un skieur, par définition, ride sur ses skis. Les plus débrouillards entretiennent leurs skis : ils les cirent au fer chaud et aiguisent manuellement les carres. Les plus aventureux vont même jusqu’à réparer des core shots en faisant des greffes de base et installent eux-mêmes leurs fixations en fabriquant des gabarits maison.
Mais qui parmi vous s’est déjà lancé dans la construction complète de sa paire de skis pour ensuite avoir le plaisir de la rider? Ça vous intéresse? Vous êtes curieux de comprendre ce qui compose votre ski et comment cela peut influencer son comportement? Cet article répondra à plusieurs de vos questions et vous permettra de résoudre bien des mystère concernant vos skis.
Grosso modo, le ski est un gros sandwich empilant des couches de plastique et de fibres, ayant pour cœur un noyau de bois. Tout cela est pressé et chauffé dans de la résine époxy. Chaque matériau, chaque forme et chaque épaisseur sélectionnés influencent le comportement du ski. On va plonger ici plus en profondeur.
Les bases des skis sont généralement composées d’une feuille d’UHMW-PE (Ultra High Molecular Weight Polyethylene) et/ou de P-Tex. Ceux-ci viennent en différentes épaisseurs et densités, sélectionnés pour répondre aux besoins du style de ski construit. Plus mince : pour plus de légèreté ; moins dense : pour une meilleure absorption de la cire de glisse ; plus dure et plus épaisse : pour les skis de parc, sujets aux impacts. On peut aussi penser à ta vieille paire de skis de roches, si lourde mais qui n’a jamais de core shot, même après des années de ski en conditions précaires. Il est toujours question de faire des compromis, c’est bien normal que les skis de randonnée avoisinant les 1500 g soient lacérés après seulement un ou deux virages dans les cailloux. Les bases sont découpées selon la forme du ski et du sidecut, généralement la découpe prévoit un espace pour le positionnement des edges.
Des bases colorées ou translucides permettent aux compagnies d’y incorporer leur logo en utilisant un assemblage de couleurs (« die cut »). Pour les bases translucides, un procédé de sublimation permet de transférer une image au choix qui apparaîtra par la suite sur la base du ski.
Petit truc maison pour les fans de DIY ou pour réparer un bon vieux ski de roches à peu de frais : tous les contenants de plastique flexible, tels que les bidons de lave-vitre, de jus ou de savon à linge, sont moulés en HDPE, le petit frère de l’UHMW-PE, et peuvent très bien servir pour patcher une base défoncée par un surplus d’excitation de début de saison (ou une journée à lapper Hog’s Back en plein hiver).
Les edges peuvent eux aussi venir en différentes dimensions. Plus petit pour plus de légèreté, pour les skis dédiés au touring et pour les skis pour enfants. Ils seront de format moyen ou gros pour augmenter la durabilité et la résistance aux impacts. Ceux-ci sont composés d’acier trempé pour une plus grande dureté. Encore ici, tes vieux skis de roche « pas tuables » le sont pour une bonne raison. Nous trouvons sur le marché des edges variant généralement de 1,3 à 2,2mm selon les différentes compagnies. Les dimensions des edges sont également proportionnelles à vos bases, les skis les plus étroits auront donc naturellement des edges plus minces et vice versa.
Sur les edges et les contours de la base, nous déposons ce que l’on appelle des gummies. Ce gummy est un matériau élastomère qui permet l’absorption des grandes différences de tensions entre les matières fibreuses et souples déposées sur le edge. Ainsi, nous réduisons grandement le risque de délamination entre ses 2 couches, c’est donc un élément essentiel à ne pas négliger.
Ensuite, une couche de fibres de verre est posée : biaxiale, triaxiale, unidirectionnelle, de 9 oz, 19 oz, 24 oz – ce sont des exemples des différents tissages et épaisseurs sélectionnés par les concepteurs pour répondre aux sensations désirées. Une fibre spéciale , comme le carbone (DPS, Dynafit, 4FRNT, Black Diamond Helio Carbon, Blizzard Zero G), le lin (Ferreol) ou même une feuille de Titanal (Rossignol Ti, Salomon Stance, K2 Mindbender Ti) , peut aussi être utilisée.
C’est quoi ça, le Titanal? Le Titanal est un alliage composé principalement d’aluminium (85-95%) et de titane (5-15%). En feuille très mince, il donne des caractéristiques de rigidité et de stabilité aux skis ; il est largement utilisé dans les skis de course et de piste, mais il est aussi présent dans les skis axés freeride et big mountain, pour ajouter rigidité et stabilité à haute vitesse.
Sur ces premières couches, le noyau de bois est posé. Selon les désirs du concepteur, des noyaux en tremble, peuplier, aspen (peuplier faux-tremble), hêtre, érable, merisier, paulownia, cèdre, bambou, etc. seront découpés, façonnés et profilés pour donner une forme et un flex uniques et précis. Le bois est un matériau essentiel dans un ski de qualité, c’est pour cette raison qu’on le nomme le « core ». Il est littéralement la structure interne sur laquelle toutes les couches de fibres et de plastique s’agrippent. Son essence et sa forme feront grandement varier le poids du ski, mais aussi le flex, la cambrure ou le rocker, la transmission des vibrations, la torsion du ski, tout en restant agréable à skier.
Parfois, on trouve des constructions sans « core » en bois, principalement dans les skis de fond ou certains skis alpins d’entrée de gamme. Ces skis sont parfois injectés d’une mousse composite, qui permet une rigidité suffisante pour un débutant, mais peu de flex et une faible résistance à la torsion. L’objectif est de réduire le coût de fabrication. Ces skis perdent vite leurs propriétés, même après un usage peu intensif. Bien sûr, c’est le genre de skis qu’on veut éviter si on est pour y poser des fixations de touring.
Aux noyaux, des « sidewall » en UHMW ou ABS sont généralement assemblés. Ceux-ci sont uniquement utilisés pour les constructions semi cap ou sandwich. Leur rôle est de protéger le noyau latéralement et de rediriger les forces appliquées directement sur les edges. Pour les constructions full cap, aucun sidewall n’est nécessaire puisque le noyau est complètement englobé par les éléments supérieurs et le topsheet.
Sur le noyau s’ajoutent différentes couches. On retrouve régulièrement un laminé de merisier ou une section du noyau renforcé aux zones stratégiques pour augmenter la force de retenue des fixations. Pour certains modèles, une pièce ou une feuille pleine de Titanal sera placée pour augmenter la retenue de la fixation (Blizzard Rustler), mais aussi la rigidité du ski pour des conditions durcies.
Nous pouvons aussi retrouver au-dessus du noyau différentes couches de fibres de verre, ou de fibres de carbone. Le tissage et l’épaisseur de la fibre feront varier les caractéristiques de flex, de torsion et de poids du ski. Certaines compagnies utilisent aussi des matériaux un peu plus atypiques comme le Surfeur 112 de Ferréol qui utilise plusieurs couches de fibres de lin combinées à un carbone 5 brins.
Finalement, pour couronner le tout, le topsheet, sur lequel des graphiques et des designs sont imprimés, sublimés ou même sérigraphiés. Ceux-ci sont principalement composés d'une feuille de polycarbonate (aussi appelé Hardcap), d’ABS, de nylon, ou de fibre de verre. Le topsheet a pour fonction principale de fermer et de protéger l’ensemble des éléments internes du ski.
Ce n’est pas tout : l’ensemble des éléments du ski n’a aucun sens s’ils ne sont pas assemblés avec une bonne quantité de résine époxy, cuite et pressée sous de fortes pressions et températures. La pression, ou le vide , sont des méthodes permettant à l’époxy de bien s’infiltrer à l’intérieur des éléments du ski pour en assurer la solidité et limiter les risques de délamination. D’un autre côté, la pression ou le vide permettent aussi de faire sortir l'excédent de résine, ce qui stabilise le poids et le flex du ski. Un surplus de résine augmenterait grandement le poids et pourrait affecter le flex du ski de manière indésirable.
Pour conclure, vous êtes maintenant un peu mieux outillés pour comprendre ce qu’il se passe sous vos pieds dans ces longs sandwichs de composites que vous utilisez tout l’hiver. En connaissant de quoi votre ski est composé, les sensations qu’il donne, et ce que vous recherchez, vous serez en un peu plus en mesure de mieux évaluer de quoi votre prochain ski devrait être fabriqué pour mieux répondre à vos besoins.
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