Climat hivernal dans l'Est : pourquoi tant de glace ?
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Climat hivernal dans l'Est : pourquoi tant de glace ?

On le sait tous, les hivers dans l'est de l'Amérique du Nord ne sont pas toujours propices à de bonnes conditions de neige. Redoux, pluie, vent, pluie verglaçante, regel... Peu importe ce que vous appréciez comme température hivernale, si vous attendez un peu, sur la côte Est, ça va finir par arriver. Reconnu mondialement pour sa glace type ciment, l'Est n'épargne personne côté températures. Plus vous allez vers le sud, plus il faut être au bon endroit au bon moment pour skier de bonnes conditions. Plus vous allez vers le nord, plus les précipitations se font rares, avec ce froid qui vous fige sur place, tout comme la neige au sol. Dans cet article, on vous explique pourquoi est-ce que l'on mérite le classique dégel de janvier et toutes les variations de température que l'on a ici.

Trois types de climat

On retrouve trois types de climat dans la partie nord-est de l'Amérique du Nord. La Nouvelle Angleterre et le sud du Québec se trouvent en zone de climat continental humide tempéré, ce qui veut dire des étés chauds, des hivers froids et beaucoup de précipitations. À partir des monts Valins, de la Côte-Nord et de l'Abitibi, on tombe en zone de climat subarctique. Les précipitations sont beaucoup plus rares que dans le sud et il fait généralement plus froid et sec. À l'extrême nord du Québec et du Labrador, on est dans la toundra. Le climat y est à la limite aride puisque l'humidité du sud ne se rend pas jusque là et il n'y a pratiquement pas d'été.

Les différents types de climat en Amérique du Nord

Le mécanisme du courant-jet polaire

Pour mieux comprendre tout ça, il faut un peu comprendre les phénomènes et les mécanismes qui nous apportent notre climat comme on le connait bien. L'un des principaux mécanismes est le courant-jet polaire. Il est en fait un courant d'air très puissant à haute altitude qui délimite deux masses d'air différentes. En hiver, il est la frontière entre l'air plus chaud du sud et l'air froid du nord. Toutes nos tempêtes majeures se produisent le long du courant-jet polaire puisque la rencontre entre les deux masses d'air crée de l'instabilité dans l'atmosphère. Il est en quelque sorte notre "storm track" comme vous avez peut-être l'habitude d'entendre. Celui-ci est loin d'être statique, il est déformé tout au long de l'hiver par les masses d'air et les dépressions venant de toute part. Il arrive donc souvent que l'on passe d'un côté ou de l'autre du courant-jet, apportant à chaque fois un dégel ou un regel. Règle générale, lorsque l'on a un courant-jet puissant, la circulation devient très zonale, c'est-à-dire d'ouest en est directement, et on observe des températures stables de jour en jour. Lorsque celui-ci est faible, il est plus facilement déformé par les masses d'air et les dépressions. Ainsi, les écarts de températures peuvent devenir impressionnants de jour en jour.

Carte de vents à haute altitude démontrant un courant-jet polaire faible.

Le phénomène du vortex polaire

Parlons maintenant du vortex polaire. Vous en avez sûrement déjà entendu parler à la télé mais c'est bien rare que l'on explique ce que c'est. Le vortex polaire est une dépression froide permanente qui est située au niveau des pôles. Il y en a un au nord et un au sud et il est principalement actif durant les mois d'hiver. C'est dans ce fameux vortex polaire qu'est contenu l'air froid qui nous apporte notre hiver comme nous l'aimons bien, froid et bien poudré. Lorsque celui-ci est puissant, il n'y a qu'une seule dépression qui contient l'air froid vers le pôle, créant en quelque sorte un dôme. Le courant-jet polaire devient alors de plus en plus plat et les vents dominants d'ouest en est s'accentuent. Ceci réduit la quantité d'air froid descendant vers le sud et nous apporte des températures généralement plus douces, habituellement autour du point de congélation. Lorsque le vortex polaire faiblit, il se sépare en plusieurs dépressions qui font alors leur chemin vers le sud avec l'air froid qui vient avec. Cela déforme le courant jet-polaire qui se met à faire la vague et permet également à l'air chaud de remonter plus au nord. Bien que cela provoque des vagues de froid comme on en a bien l'habitude en février, cela nous apporte aussi les classiques dégels auxquels nous sommes bien habitués lorsque l'air froid n'atterrit pas au bon endroit. En règle générale, lors d'événements de ce genre, si l'air froid atterrit dans l'ouest du continent, l'air chaud remontera dans l'est. L'inverse est aussi valable. Pour les nerds, la force du vortex polaire est constamment surveillée et documentée par l'index nommé Arctic Oscillation ou AO.

Les zones de haute pression : Azores High et Bermuda High

Il y a aussi un autre phénomène, celui-ci moins connu du grand public qui influence grandement notre climat sur la côte Est. Il est défini par deux zones de haute pression quasi permanentes dans le milieu de l'océan Atlantique Nord : le Azores High et le Bermuda High. Comme leurs noms l'indiquent, le Azores High se trouve principalement autour des Açores et le Bermuda High autour des Bermudes. Ces derniers créent une circulation atmosphérique dans le sens des aiguilles d'une montre dans l'océan Atlantique qui est plus ou moins puissante selon la force des anticyclones. Comme cela a le pouvoir de faire remonter les masses d'air plus chaudes du sud vers le nord ou encore de bloquer la progression des tempêtes vers l'océan et de les renvoyer vers le Québec, l'impact sur notre climat est important. Tout dépend de la position et de la force de ces anticyclones. En présence d'un Bermuda High très puissant et près de la côte, l'air chaud remonte vers nos régions et si cela coïncide avec une faiblesse du vortex polaire, on a un redoux. Si on a une tempête qui s'approche de nos régions, le Azores High est faible, trop près des côtes de l'Europe et le Bermuda High inexistant, elle sortira directement à l'océan sans grande histoire. Lorsque le positionnement et le synchronisme sont bons, la tempête se prend alors dans la circulation atmosphérique créée par l'anticyclone et longe la côte, donnant ainsi naissance à une tempête de type Nor'Easter.

Pattern typique associé au Bermuda High

Bataille entre air chaud et air froid

Toutes ces variations de température sont habituellement contenues en Nouvelle Angleterre et dans le sud du Québec où l'influence du vortex polaire est plus limitée. Les vents dominants y sont du sud-ouest, ce qui permet à l'air chaud et à l'humidité de remonter et de nous apporter de la pluie et de la neige en quantités appréciables. Ces régions sont en quelque sorte le champ de bataille entre l'air chaud venant du sud et l'air froid venant du nord, ce qui explique les variations de température parfois extrêmes. Pour les régions avec un climat subarctique, les vents dominants sont du nord-ouest ce qui empêche l'air chaud, la plupart du temps, de remonter sur ces régions. L'air froid ne contenant pas autant d'humidité, le climat y est donc plus sec et les grosses chutes de neige plus rares. Par contre, les épisodes de dégel sont beaucoup moins fréquents sur ces régions, ce qui permet d'accumuler plusieurs mètres de neige et de la conserver très longtemps au printemps et même jusqu'en été par endroits. Pour les régions situées dans la toundra, les chutes de neige abondantes se produisent au début et à la fin de leur saison d'hiver, c'est-à-dire à la fin du printemps et à la fin de l'été. L'air glacial qui domine ces régions est tout simplement trop froid pour contenir de grandes quantités d'humidité et la densité de la masse d'air bloque la progression des tempêtes venant du sud, donnant lieu à un climat plutôt aride en hiver.

Le phénomène de dépression

Parlons maintenant de précipitations. Pour qu'il neige ou qu'il pleuve ou qu'il tombe de la matière gelée quelconque, cela prend évidemment une dépression. Le type de précipitations qu'elles apportent dépend de leur provenance et de leur trajectoire. Toutes les dépressions créent une circulation atmosphérique dans le sens des aiguilles d'une montre autour de leur centre. Ce faisant, on se retrouve avec des vents du sud à l'est du centre de la dépression et des vents du nord à l'ouest de celui-ci. Cela a pour effet de créer un côté chaud et un côté froid à chaque dépression, le côté chaud étant à l'est du centre et le côté froid, à l'ouest. Dans toutes nos tempêtes majeures, les précipitations tombent majoritairement sous forme de pluie dans le côté chaud et en neige sur le côté froid. Lorsque les conditions sont propices, il arrive que l'on observe des inversions de température dans certaines dépressions, c'est-à-dire que de l'air plus chaud au-dessus de zéro se retrouve en sandwich entre la couche d'air froid au sol et celle plus en altitude, donnant lieux à un cocktail de précipitations ou carrément du verglas. Voyons maintenant à quelle forme de précipitation est généralement associé chaque type de dépression.

Les dépressions froides : elles nous viennent directement du pôle Nord. Puisqu'elles ne sont pas influencées par les vents dominants venant de l'ouest, leur trajectoire est erratique et difficile à prévoir. Elles sont caractérisées par une masse d'air froide dans la troposphère au-dessus d'elles et deviennent de plus en plus puissantes lorsqu'on monte en altitude. Ce faisant, elles créent une importante circulation atmosphérique dans le sens antihoraire et emportent une grande quantité d'air froid avec elles. Elles ne nous apportent généralement pas (ou peu) de précipitations mais l'air froid et la circulation qu'elles génèrent peuvent influencer d'autre tempêtes au sud et parfois les diriger vers nos régions.

Dépression froide et le creux dans le courant jet qu'elle occasionne sur la cote Est.

Les clippers de l'Alberta : comme le nom l'indique, ces systèmes prennent naissance en Alberta, souvent des restes de tempêtes ayant touché la Colombie-Britannique. Ils se produisent généralement juste au nord du courant-jet et ne contiennent pas beaucoup d'humidité et d'énergie. Ils apportent entre 5 et 15 cm de neige en règle générale. Par contre, c'est lors de ce genre de systèmes peu puissants que le soulèvement orographique (ou l'ascendance forcée de l'air sur un relief montagneux) se produit ce qui peux mener à des totaux beaucoup plus impressionnants en montagne.

Trajectoire typique d'un Clipper 

Les dépressions du Colorado : celles-ci sont un coup de dés. Ce sont les dépressions du Colorado qui nous apportent nos cocktails météos que nous pouvons observer parfois durant l'hiver. Puisqu'elles se forment et passent relativement proches du Golfe du Mexique, elles absorbent au passage l'air chaud et humide de ces régions et le renvoient vers nous. Tout est possible avec une dépression du Colorado puisque c'est la trajectoire qui déterminera le type de précipitations. En règle générale, c'est de la neige à l'ouest du centre de la dépression et de la pluie à l'est avec un mélange des deux le long d'un front. Elles apportent entre 15 et 30 cm de neige pour ceux qui se trouvent sur le côté froid. Par contre, lorsque ces dépressions sortent à la mer puis remontent vers nous, elles nous apportent les Nor'easters les plus puissants.

Trajectoire d'un Colorado low. Ces dépressions sont portées à suivre la vallée du Saint-Laurent par la suite.

Les dépressions du golfe du Mexique : prenant naissance dans l'air chaud et humide du sud, ces dépressions nous apportent souvent de la pluie. Leur centre passe généralement au nord du fleuve et se rend loin dans les terres ce qui apporte de la pluie parfois jusque sur la Côte-Nord et loin au nord du Lac-Saint-Jean en plein hiver. Elles sont souvent accompagnées d'un creux important dans le courant-jet, ce qui nous apporte des températures largement au-dessus des normales suivies d'un regel rapide, donnant lieu à des conditions de glace pare-balle comme on en a l'habitude.

Trajectoire typique d'une dépression du Golfe du Mexique

Les Nor'easters : ceux-ci sont le produit d'un synchronisme parfait entre plusieurs éléments. En premier lieux, on doit avoir un anticyclone dans l'océan Atlantique qui crée une circulation vers le nord au large de la côte Est. Ensuite, on doit avoir une dépression qui sort du continent et qui sera influencée par cette circulation. Cela la dirigera vers le nord puis, s'il n'y a rien pour bloquer sa progression au nord et à l'ouest, elle viendra toucher nos secteurs. En sortant du continent, la tempête vient se gorger de l'humidité de l'océan et prend de l'énergie rapidement. Elle viendra alors déverser une importante quantité de neige le long de la côte et parfois loin dans les terres. Il n'est pas rare de voir des totaux dépasser les 30 cm dans les basses terres avec ces tempêtes qui laissent parfois plus d'un mètre de neige en quelques jours dans les montagnes.

Le premier Nor'easter de 2018

Et voilà. En espérant que cela vous aide un peu mieux à comprendre le climat sans pitié que l'on a sur la côte Est. Malgré tout, on va se le dire... on fait quand même du très beau ski chez nous. Pas besoin d'aller dans l'Ouest pour s'étouffer avec des faceshots. Il suffit seulement de connaître les endroits les plus neigeux et d'être à l'affût de prévisions météo venant de sources fiables. Sur ce, bon temps des Fêtes à tous et n'oubliez pas de suivre attentivement nos bulletins météo !

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